Propos de Le Pen sur le titre « honorifique » de chef des armées : la majorité s’indigne, la candidate s’explique

Dans un entretien au Télégramme mercredi, la candidate RN Marine Le Pen a estimé que le rôle de chef des armées du président s’avérait « honorifique » face au Premier ministre, déclenchant de nombreuses réactions. Elle s’est depuis expliquée sur ses propos.

« Chef des armées, pour le Président, c’est un titre honorifique puisque c’est le Premier ministre qui tient les cordons de la bourse », a affirmé Marine Le Pen mercredi soir.
« Chef des armées, pour le Président, c’est un titre honorifique puisque c’est le Premier ministre qui tient les cordons de la bourse », a affirmé Marine Le Pen mercredi soir. (Photo archives Le Télégramme/Lionel Le Saux)

Un bras-de-fer diplomatique s’engagera-t-il en cas de cohabitation entre le président de la République Emmanuel Macron et un gouvernement formé par le Rassemblement national ? Marine Le Pen a en tout cas laissé planer le doute mercredi soir, dans un entretien accordé au Télégramme : « Chef des armées, pour le Président, c’est un titre honorifique puisque c’est le Premier ministre qui tient les cordons de la bourse. Jordan n’a pas l’intention de lui chercher querelle, mais il a posé des lignes rouges. Sur l’Ukraine, le Président ne pourra pas envoyer de troupes ».

La majorité présidentielle s’étrangle

Ces propos ont fait bondir le président du MoDem François Bayrou, soutien de la majorité : « Si vous prétendez que celui qui nomme aux emplois civils et militaires de l’État, celui qui préside les conseils de défense, celui dont la Constitution dit en toutes lettres qu’il est le chef des armées, si vous prétendez que ce n’est pas vrai, que ce serait des titres pour faire joli, alors vous mettez en cause profondément la Constitution », a-t-il affirmé sur Europe1-Cnews, jugeant cette déclaration « extrêmement grave ».

Selon lui, la Constitution préserve « la démocratie : pouvoir vivre ensemble avec des opinions différentes et même divergentes et même opposées parce que nous avons une règle du jeu qui s’impose à tout le monde ».

« Quelle arrogance de Marine Le Pen qui considère que le RN a déjà gagné les élections au mépris des électeurs français (…) Quelle arrogance de vouloir systématiquement réécrire par avance la Constitution », a déclaré dans la foulée Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de l’Europe sur TF1.

Sébastien Lecornu, ministre des Armées, a également critiqué l’usage du mot « honorifique » par Marine Le Pen, en citant le général de Gaulle : « Suivant la Constitution, le président est, en effet, garant, vous entendez bien ? Garant de l’indépendance et de l’intégrité du pays, ainsi que des traités qui l’engagent. Bref, il répond de la France. D’autre part, il lui appartient d’assurer la continuité de l’État et le fonctionnement des pouvoirs. Bref, il répond de la République ».

La candidate s’explique

Marine Le Pen n’a pas tardé à clarifier ses propos, notamment sur « X » : « Sans remettre en cause le domaine réservé du président de la République, en matière d’envoi de troupes à l’étranger, le Premier ministre a, par le contrôle budgétaire, le moyen de s’y opposer, annonce-t-elle. Jordan Bardella était donc fondé à rappeler qu’il est opposé à l’envoi de militaires français en Ukraine ».

Et de réagir aux propos du président du MoDem : « Monsieur Bayrou, qui a choisi l’outrance sur le tard, devrait se souvenir qu’en décembre 1999, le Premier ministre Lionel Jospin s’était opposé à la volonté du chef de l’État d’envoyer des troupes en Côte-d’Ivoire au moment du putsch du général Guéï », a-t-elle écrit avant d’ajouter en conclusion : « La Constitution, toute la Constitution, rien que la Constitution ».

Que dit la Constitution ?

Lors des trois précédentes cohabitations de la Ve République, le chef de l’État a conservé de larges pouvoirs en matière de politique internationale et de défense, à tel point qu’on parlait de « domaine réservé » selon l’expression de Jacques Chaban-Delmas. Mais le site vie-publique rappelle bien qu’elle « ne signifie pas que l’action en matière de politique étrangère et de défense relève du seul président de la République. Le Gouvernement dispose lui aussi, de par la Constitution, de larges prérogatives ». De fait, cette notion « domaine réservé » est le fait de « l’usage, plutôt que la Constitution elle-même ».

La Constitution rappelle ainsi que si le Président est bien « chef des Armées » (article 15), préside les conseils de défense nationale et peut décider seul de l’emploi de l’emploi de la force nucléaire française, « le Premier ministre dirige l’action du gouvernement », déterminant et conduisant la politique de la Nation, et s’avère « responsable de la défense nationale » (article 21). Un haut-fonctionnaire le résume ainsi au HuffPost : « La politique étrangère relève du quai d’Orsay, qui relève du gouvernement, et donc du Premier ministre. Même chose pour les Armées. Emmanuel Macron ne pourrait quasiment plus rien décider sur l’Ukraine par exemple ».

Newsletter Politique
L’essentiel de l’actualité politique bretonne
Le lundi à 19h
Revenir en arrière

Propos de Le Pen sur le titre « honorifique » de chef des armées : la majorité s’indigne, la candidate s’explique

sur Facebooksur Twittersur LinkedIn
S'abonner
Application Le Télégramme Info Bretagne

Application Le Télégramme

Vous aimez la Bretagne ? Vous allez adorer l'application du Télégramme. Profitez d'une expérience de lecture personnalisée et d'un accès rapide à l'actualité de votre commune.

Application Le Télégramme Journal
Application Le Télégramme Journal